Depuis une vingtaine d’années, les politiques publiques affichent des objectifs ambitieux de décarbonation des mobilités, en particulier pour répondre aux problèmes de la pollution atmosphérique et du changement climatique. En 2019, le secteur des transports représentait 31 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France. Or, à cette date, aucun élément tangible n’indiquait qu’une baisse de ces émissions était en vue. Malgré les politiques volontaristes d’électrification des motorisations des véhicules et d’incitation au report des automobilistes vers d’autres modes de déplacement (transport collectif, vélo, marche), les émissions de gaz à effet de serre ont continué à croître entre 2010 et 2019.
La période qui s’est ouverte en 2020 avec la gestion de l’épidémie de Covid-19 a pourtant bousculé le fonctionnement des mobilités : les mobilités quotidiennes ont été bouleversées par le confinement du printemps 2020 et par l’essor du télétravail ; les mobilités longue distance ont été contrariées au fur et à mesure des fermetures de frontières et des restrictions de circulation ; les mobilités de marchandise ont été perturbées par des ruptures de chaîne d’approvisionnement. De nombreux acteurs ont souhaité s’emparer de cette période inédite pour engager des réflexions profondes sur notre système mobilitaire et nos modes de vie. De nouveaux comportements individuels et collectifs ont été observés et des politiques publiques ont été engagées pour préparer « le monde d’après » pandémie. Pour autant, ces changements augurent-ils d’une meilleure prise en compte des enjeux de transition écologique dans les transports et la mobilité et des aspirations des citoyens à vivre en plus grande proximité et à mieux maîtriser leur rythme de vie ? Comment caractériser les évolutions observées depuis 2020 dans nos pratiques de mobilité et dans les politiques publiques ? La gestion de l’épidémie de Covid-19 est-elle une adaptation temporaire à une situation d’urgence ou marque-t-elle un tournant durable dans la transition écologique des mobilités ? Quelles tendances de fond pourraient marquer le futur de nos mobilités et de nos modes de vie ?
Ce dossier questionne la dimension écologique des mobilités au regard des évolutions constatées depuis le début de la gestion de l’épidémie de Covid-19 en 2020. Pour parer au risque de myopie de la réflexion, ce dossier privilégie des éclairages inscrits dans une approche de long terme, visant à comprendre les inflexions ou les continuités dans les pratiques de mobilités et dans la manière de penser et de mettre en œuvre les politiques publiques contemporaines. Les textes, podcasts et portfolios rassemblés progressivement dans ce dossier permettent également de mieux discuter la notion de transition en matière de mobilité. Si de premiers éléments de bilan issus d’enquêtes quantitatives et qualitatives pourront venir éclairer les processus à l’œuvre, le dossier présente aussi des études de cas appuyées sur des recherches achevées ou en cours. La démarche engagée s’inscrit dans une perspective pluridisciplinaire et souhaite faire dialoguer des chercheurs et d’autres protagonistes de l’arène des mobilités. Dans cette perspective, le dossier met l’accent sur les formats alternatifs d’articles : vidéos, animations, portfolios photographiques, podcasts-radios.
Au sommaire de ce dossier :
- « Revenge travel : aéromobilités et industrie aérienne après la pandémie », Weiqiang Lin.
- « Le Covid a-t-il grippé les transports collectifs ? », podcast, entretien avec Annelise Avril et David Henny.
- « Quelle politique de la marche après les confinements ? », podcast, entretien avec Jenny Leuba.
- « Urbanisme tactique cycliste et crise sanitaire », Laurent Chapelon, Sandrine Depeau, Benoît Feildel, Adrien Lammoglia, Maëlle Lucas, Nathalie Ortar et Adrien Poisson. (à paraître)
- « Le mythe de l’exode urbain parisien. Quelles mobilités en temps de crise sanitaire ? », Nadine Cattan, Olivier Telle et Céline Vacchiani-Marcuzzo.
- « Des inflexions durables dans l’usage post-Covid de la voiture ? Le cas de la métropole de Lyon », Stéphanie Vincent, Olivier Klein, Ali El Zein, Pascal Pochet et Adrien Beziat.
- « Les politiques de mobilité des métropoles ont-elles été redéfinies par la crise du Covid ? », Jean Debrie et Juliette Maulat.