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Débats

Une récupération à grand bruit de la colère habitante

Il y a quelques mois, nous publiions un article montrant comment, à Roubaix, les élus « empêchent la constitution d’un collectif soudé d’habitants face à un projet de rénovation urbaine qui s’impose à eux ». Pierre Chabard revient sur cette lecture et montre que si l’association étudiée par l’auteur est certes systématiquement entravée, elle n’est pas la seule initiative ayant tenté de donner la parole aux habitants. C’est le rôle que peut endosser l’architecte qui est ici souligné, posant la question de savoir si le contre-pouvoir est la forme la plus efficace de participation.

Dossier : Rénovation urbaine. L’espace comme remède à la question sociale ?

La participation des habitants est affichée comme une priorité du Nouveau Programme national de rénovation urbaine (NPNRU, 2014‑2024), qui parle même de « co-construction ». Localement, les choses sont pourtant loin d’aller de soi. Dans l’article qu’il consacre au quartier du Pile à Roubaix, en cours de rénovation, le sociologue Julien Talpin dénonce les stratégies des acteurs municipaux pour encadrer et contrôler les fragiles processus impliquant ou émanant des citoyens (Talpin 2016).

Pourquoi réagir à cet article, long et étayé ? Le sociologue pose des éléments indiscutables de diagnostic. Produit d’une industrie textile disparue depuis quelques décennies déjà, ce quartier populaire multiculturel très dense (plus de 120 logements à l’hectare), doté d’une forte identité, composé principalement de minuscules maisons ouvrières, concentre les principaux problèmes sociaux de notre époque : chômage, précarité, mal-logement, inégalités, etc. À ce titre, le Pile a été sélectionné avec 25 autres sites en France pour bénéficier du Plan national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) (Raad 2015), programme volontariste de l’État, financé via l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) et l’Agence nationale d’amélioration de l’habitat (ANAH). Site le mieux doté financièrement des cinq retenus dans la métropole lilloise [1] (avec 42,7 millions d’euros), il fait l’objet, depuis 2013 et jusqu’en 2020, d’une importante opération de rénovation urbaine.

Fragile et vulnérable, ce territoire de pauvreté exige néanmoins justesse, précaution et précision de ceux qui se penchent à son chevet, que ce soit pour agir ou pour l’analyser. C’est la raison pour laquelle la critique de Julien Talpin ne peut rester sans réponse. Enseignant-chercheur à l’université Lille‑2, spécialiste des luttes urbaines et des processus de mobilisation citoyenne (notamment dans le cas roubaisien de l’Alma-Gare (Cossart et Talpin 2015)) et lui-même engagé sur le terrain du Pile (aux côtés de l’association UPC) [2], le sociologue modélise la situation comme un rapport de force binaire opposant les pouvoirs publics aménageurs et les « habitants » victimes de ces aménagements, comme un affrontement entre approches top‑down et bottom‑up. Le programme actuel de requalification urbaine du Pile serait, selon lui, motivé par une approche résolument spatiale (résorption de l’habitat insalubre, dé‑densification, réhabilitation ou démolition des maisons, embellissement de l’espace public) et par un « objectif explicite (…) [de] “mixité sociale” attirant des classes moyennes dans ce quartier populaire de mauvaise réputation » (Talpin 2016). Contre cette logique de gentrification, portée par une maîtrise d’ouvrage n’ayant « prévu qu’une concertation minimale sur le projet » (Talpin 2016), la colère des habitants aurait été prise en charge par une « table de quartier » lancée en mai 2015 et animée par des associations locales indépendantes, qui ont obtenu quelques acquis (relogement, concertation) mais subiraient en retour une « répression à bas bruit » (Talpin 2016) de la part de la puissance publique.

Maillon manquant

Bien qu’elle s’appuie sur certains faits tangibles, cette interprétation reste partielle et ne reflète pas la complexité du terrain. Par un effet de loupe, elle tend à survaloriser le dispositif de la « table de quartier », directement inspiré des méthodes du community organizing que le sociologue a observées en Amérique du Nord et dont il se fait le promoteur en France (Balazard et Talpin 2016). Par un effet de masque, elle laisse dans l’ombre un acteur pourtant majeur de cette histoire, présent sur le terrain depuis l’été 2012 : l’équipe de maîtrise d’œuvre urbaine. Menée par l’architecte Pierre Bernard et le paysagiste Axel Vénacque, elle a été désignée en mars 2013, au terme d’une longue consultation [3], pour piloter pendant sept ans l’opération de requalification urbaine. C’est en tant que critique d’architecture que je me suis intéressé aux propositions de cette équipe pluridisciplinaire appelée « Pile fertile », qui relèvent moins d’un projet urbain que d’une méthode d’action. J’en ai observé les développements sur le terrain entre l’automne 2012 et l’été 2014, en vue d’un article publié dans la revue Criticat (Chabard 2014).

L’équipe du Pile fertile a affiché d’emblée des ambitions sociales fortes, débordant le cadre de la commande, et adopté des positions critiques vis-à-vis des procédures courantes de la rénovation urbaine, entérinant leur échec à résoudre les problèmes de ce quartier. Le Pile constitue un cas limite de la politique de la ville. Il en est à la fois le bénéficiaire (à travers une succession d’études, de rapports, d’initiatives et de projets urbains depuis les années 1980), et la victime. En effet, la principale conséquence de ces initiatives fut l’acquisition de foncier par le domaine public, ce qui conduisit à murer des maisons sur une longue durée, accentuant le sentiment d’abandon de la population.

Consciente de ce lourd passif, l’équipe du Pile fertile a cherché à repenser à la fois les fins et les moyens de la renovation. Les premières s’incarnent dans quelques grands principes qui vont souvent à contre-sens des attendus de l’ANRU : ne pas « créer de la mixité » mais travailler avec la diversité sociale existante ; éviter la gentrification et transformer le quartier pour et avec ses habitants ; ne pas se concentrer uniquement sur le bâti mais multiplier et croiser les thèmes d’action (sur le végétal, les déchets, l’espace public, la transition énergétique, le développement culturel) ; refuser le primat de la densité, portée par la puissance publique (notamment à travers les prescriptions de la ZPPAUP [4] en vigueur au Pile) et démolir certaines maisons pour élargir un espace public étroit et minéral, saturé par les voitures et les poubelles. En ce qui concerne les moyens, le Pile fertile propose les modes opératoires les plus ouverts et inclusifs. Plutôt que de dessiner un projet a priori (ce que leur réclamaient ses commanditaires), l’équipe imagine une méthode d’action associant les gens du quartier. Dépassant la simple « concertation » imposée par l’ANRU, elle les implique dans un processus non seulement de participation mais aussi de coproduction de la transformation du Pile, jalonné par une dizaine d’ateliers publics depuis l’été 2013.

Figure 1. Diagnostic en marchant du quartier du Pile à Roubaix, organisé par l’équipe Pile fertile, le 10 juillet 2013

© Association Hors cadre.

Après une journée de « diagnostic en marchant » (le 10 juillet 2013) dont les habitants étaient à la fois acteurs et coorganisateurs, ces ateliers publics, rassemblant plusieurs dizaines de personnes, ont eu lieu à un rythme relativement soutenu (d’abord mensuels puis plus espacés pendant la longue période de ralentissement imposée par l’alternance politique à la mairie de Roubaix [5]) et ont porté sur deux thèmes principaux : la conception partagée d’un parc cogéré par les habitants sur la friche d’une ancienne usine de teinturerie au cœur du quartier et les modalités de réhabilitation des maisons elles-mêmes. À la Maison du projet (ouverte entre décembre 2012 et septembre 2016 [6]) ou directement sur le terrain, les « Pilés » [7], informés par tracts ou bouche à oreille via les réseaux familiaux, sociaux et/ou associatifs existants, étaient ainsi invités à interagir avec l’équipe du Pile fertile dans le but de coproduire les transformations du quartier. Parmi d’autres initiatives, un échantillon du futur parc du Pile, protégé par des grillages, est d’ores et déjà cultivé par un groupe de résidents avec l’appui des paysagistes du Pile fertile. Plutôt que de la décréter sur leur planche à dessin, ces derniers estiment que la forme de ce parc « doit être la forme de sa gestion » [8].

Moins consensuelle que le jardinage cogéré, la question de la réhabilitation des maisons ouvrières du Pile a été soumise au même processus participatif, avec un premier atelier à l’automne 2013. Mitoyennes, construites en brique sur des parcelles longues et étroites (moins de 4 mètres), ouvertes à l’arrière sur une courette, ces maisons étaient destinées à un seul ménage, généralement propriétaire. D’une vingtaine de mètres carrés au sol, chacun des trois niveaux comprend deux petites pièces séparées par un escalier raide. Le deuxième étage est dans les combles, éclairé par de minuscules vasistas. Construites par séries de quatre ou cinq, elles forment, en rangs serrés, des îlots longs et étroits. Abritant aujourd’hui des profils d’habitants extrêmement divers du point de vue social, ethnique et générationnel, les quelques 200 maisons ouvrières du Pile n’en présentent pas moins une grande régularité dans la configuration spatiale comme dans les problèmes qu’elles concentrent : vétusté, insalubrité, absence d’isolation thermique, saturation des courettes entraînant un manque d’ensoleillement, repli de la vie domestique à l’arrière, à l’opposé de la rue.

Figure 2. Atelier public sur la rénovation des logements du quartier du Pile à Roubaix, organisé par l’équipe Pile fertile, le 13 novembre 2013

© Association Hors cadre.

Éviter toute expropriation, racheter à l’amiable les maisons avec promesse de relogement au Pile pour ceux qui souhaitent y rester, réhabiliter avec et pour les habitants : les objectifs simples et clairs de l’équipe du Pile fertile, nourris par les ateliers publics, s’articulent difficilement aux modes opératoires imposés par l’ANRU. Centralisés et morcelés, ceux-ci créent des problèmes autant qu’ils en résolvent : les rachats et réhabilitations lourdes grèvent le prix de revente des maisons ; la procédure dite d’accession sociale à la propriété qui conditionne le déclenchement des travaux « gèle » indéfiniment des maisons, empêchant d’y reloger les Pilés.

Contraints à trouver des marges de manœuvre à l’intérieur de ce système, les architectes de l’équipe ont combiné leur travail de conception spatiale à une réflexion économique. Selon eux, on peut réduire le coût de sortie des maisons de 25 % à 30 % après réhabilitation. Pour cela, il ne faut pas les traiter au cas par cas mais plutôt travailler sur des prototypes reproductibles d’éléments de construction (gaines techniques, escaliers, chiens-assis, etc.) pour les amortir économiquement, et surtout impliquer les habitants dans la réalisation, en aval, de certaines prestations (second œuvre, jardin). Cette dernière idée – livrer une maison non finie pour en réduire le prix – rejoint la théorie de l’habitat incrémental (Aravena et Iacobelli 2016) de l’architecte Alejandro Aravena, commissaire de la Biennale d’architecture de Venise 2016, qu’il a mise en pratique à grande échelle au Chili, donnant aux classes sociales vivant sous le seuil de pauvreté accès au logement et à la propriété [9].

Certes, au Pile, ces propositions n’ont eu que peu de suites : malgré les études techniques poussées produites par les concepteurs et un chantier témoin, aucune maison n’a été pour le moment rénovée selon ce mode [10]. L’équipe Pile fertile n’a pas encore su convaincre ses commanditaires de déroger aux procédures ANRU et d’engager une telle expérimentation, et encore moins de la partager avec les habitants. Pour Pierre Bernard, « c’est impossible tant que la technostructure municipale ne s’en est pas emparée » [11]. Cependant, l’engagement quotidien de l’équipe Pile fertile pour redéfinir son rôle et dépasser la simple prestation de services (à laquelle la cantonne ladite technostructure) est suffisamment rare pour ne pas être passé sous silence.

Fronts multiples

Pour le maître d’œuvre, s’engager dans ces voies alternatives, c’est s’aventurer en dehors du cadre de la commande, prendre le risque de s’opposer à son commanditaire, mettre en question ses propres outils (notamment l’outil du « projet »), faire évoluer son propre statut (de concepteur à médiateur). Mais surtout, c’est tenter, de l’intérieur, de faire évoluer les pratiques, les procédures et les modes opératoires.

Le texte engagé de Julien Talpin n’envisage l’alternative qu’à l’extérieur, en marge des pratiques professionnelles. Il ne conçoit l’action citoyenne que dans une tension entre pouvoir et contre-pouvoir, entre dominants et dominés. Alternant la temporalité immédiate de l’échange avec les gens du Pile et celle plus lente de la mise au point d’une stratégie de transformation physique du quartier, l’équipe Pile fertile négocie, quant à elle, avec une réalité à la fois plus complexe et plus productive. Même si, pour le moment, elle a rencontré plus de succès sur l’aménagement du parc et sur l’action socioculturelle [12] que sur la réhabilitation des maisons, elle porte une réflexion critique sur les méthodes courantes de la rénovation urbaine. Mandatée par la collectivité, elle ne représente donc pas un contre-pouvoir. Cependant, la marge de manœuvre que lui confère sa position de maître d’œuvre lui permet d’orienter le projet de rénovation vers des pratiques plus ouvertes aux habitants. Dans cette tâche, l’équipe de maîtrise d’œuvre doit lutter en premier lieu contre la méfiance des élus, qui, en France, voient souvent dans la participation citoyenne le risque d’une érosion de leur pouvoir. Mais elle doit affronter aussi l’inertie des personnels techniques et administratifs, protégés de la sanction électorale et sceptiques quant à l’implication des habitants, que ce soit pour la conception, la fabrication ou, a fortiori, la gestion de leur cadre de vie. Dans un climat de réduction de moyens, les services techniques de la ville qui instruisent les propositions cogestionnaires du Pile fertile pour les élus semblent redouter que la totalité de la charge de travail puisse, à terme, leur incomber. Invoquant le principe de précaution, ils s’y opposent et justifient en même temps aux yeux de leur hiérarchie leur irremplaçable compétence. De fait, depuis novembre 2015, les commanditaires de l’équipe Pile fertile bloquent les moyens, pourtant disponibles, pour organiser les ateliers participatifs sur les différents thèmes cruciaux pour le quartier (l’habitat, l’espace public et la transition énergétique).

Figure 3. Atelier public sur le thème de la cogestion urbaine au quartier du Pile à Roubaix, organisé par l’équipe Pile fertile, le 11 mars 2014

© Association Hors cadre.

Cela n’a nullement empêché l’équipe Pile fertile de poursuivre les études, d’approfondir l’observation du terrain et de multiplier les échanges avec les « habitants », terme valise cachant une nébuleuse hétérogène dont elle a appris à cartographier plus finement les lignes de tension internes (sociales, générationnelles, communautaires, etc.). Ce fut le cas lors des enquêtes en porte-à-porte en octobre 2013 et mai 2015 par Myriam Brique (HB Études & Conseils), la sociologue de l’équipe, mais aussi plus généralement dans l’expérience quasi quotidienne du quartier par les autres membres de l’équipe de 2013 à 2015.

Transformer le quartier pour et avec les gens qui l’habitent exige non seulement de les connaître et de savoir les écouter, mais aussi de nouer des relations de confiance dans la durée. Cela suppose aussi de créer les conditions de ce que les anglophones appellent leur « empowerment » (Bacqué et Biewener 2015). Ce néologisme à la mode est ambigu en français selon qu’on le traduit par une augmentation du « pouvoir » ou de la « puissance ». Entre « pouvoir sur » et « pouvoir de », l’architecte Pierre Bernard a clairement choisi : « donner de la puissance d’agir n’implique pas forcément de donner le pouvoir. Le plus fécond dans l’agir collectif n’est pas l’antagonisme pouvoir/contre-pouvoir mais c’est le passage de la puissance à l’acte, c’est l’actualisation de la potentialité du pouvoir. La participation est facile quand il s’agit de réfléchir collectivement à l’action ; elle se complique quand il s’agit de réaliser ; elle se corse franchement quand il s’agit de cogérer. Ce sont les problèmes de la cogestion qui ont eu raison de l’Alma-Gare… » [13].

Bien qu’elle soit financée par les fonds de la politique de la ville (à hauteur de 15 000 euros par an), la « table de quartier » se définit, quant à elle, clairement comme un contre-pouvoir, comme le lieu de la « prise en charge de la colère », voire de « l’émergence de mobilisations contestataires » (Talpin 2016). Elle est « portée par l’Association Nouveau Regard sur la jeunesse (ANRJ) » (une association fondée en novembre 2004 et animée par des jeunes du Pile) et gérée « avec l’appui de l’Université populaire et citoyenne de Roubaix (UPC) ». Partenaires des actions du Pile fertile dès les débuts, l’ANRJ et l’UPC, politiquement proches du parti des Verts, sont devenus ses opposants dès lors que la mairie de Roubaix a basculé à droite et que la nouvelle équipe municipale a multiplié les initiatives pour les exclure du processus. Depuis, l’UPC se fait le porte-voix du ressentiment des Pilés face à la lenteur et aux difficultés de la rénovation de leur quartier. Elle a récemment contribué à publier le premier numéro de À Table ! [14], le journal de la table de quartier du Pile–Sainte-Élisabeth dont le contenu est unilatéral et parfois caricatural : « toujours pas de concertation publique, pas de réunion dans le quartier, ou alors (…) sans les principaux intéressés », « nous nous retrouvons (…) devant le fait accompli », « non seulement le projet a été décidé sans les habitants mais, pire encore, des propriétaires et locataires doivent être délogés, voire expropriés », etc. Il est possible que les initiatives participatives du Pile fertile aient pu échapper à certains habitants. Mais l’UPC, qui y a pris part pendant un temps, ne pouvait les ignorer. Imparfaite et expérimentale, en butte à la frilosité de sa maîtrise d’ouvrage, l’action de l’équipe Pile fertile mérite une analyse critique, comme tout engagement intellectuel et pratique, mais il faut néanmoins reconnaître son existence, ses ambitions et ses effets.

Pouvoir vs contre-pouvoir ou top‑down vs bottom‑up : ces modèles binaires fonctionnent comme des lunettes déformantes. Ils arment une dénonciation légitime des entraves municipales à la participation citoyenne, mais laissent dans l’angle mort certains acteurs intermédiaires qui tentent de la faire vivre au quotidien. Au delà du cas particulier du Pile, ce déni, du moins cet oubli, illustre plus généralement le risque potentiel d’une concurrence entre les divers types d’acteurs de la participation. À une époque où celle-ci devient une priorité de la politique de la ville, les acteurs politiques, institutionnels, professionnels ou associatifs ont des intérêts parfois divergents à faire valoir leur hégémonie dans ces processus participatifs, au risque de les enrayer.

L’histoire récente du Pile illustre également les difficultés structurelles qui pèsent sur les opérations de rénovation urbaine : ambiguïté de l’ANRU (qui centralise les moyens de la puissance publique, tout en prônant la participation, donc le partage de ces moyens), instabilité de l’échiquier politique local, inertie des modes opératoires technico-administratifs, dépendances diverses du milieu associatif, tiraillements entre intérêt général et intérêts particuliers. Elle illustre enfin le rôle équivoque de l’architecte, à la fois acteur de la transformation, expert que l’on a tendance à confondre avec les intérêts de ses commanditaires et intellectuel critique dont les ambitions débordent souvent largement (et contestent parfois) le cadre strict de son mandat.

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Pour citer cet article :

Pierre Chabard, « Une récupération à grand bruit de la colère habitante », Métropolitiques, 7 février 2017. URL : https://metropolitiques.eu/Une-recuperation-a-grand-bruit-de.html

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