Professeur émérite à l’université de Genève, Antoine Bailly vient de recevoir en 2011 le prix Vautrin Lud, considéré comme le « Nobel » de géographie. Ce prix couronne la carrière d’un géographe impliqué dans son temps, qui a contribué au renouvellement de la discipline. Formé entre la France, le Canada et les États-Unis, où il découvre la science régionale et les méthodes quantitatives, il contribuera dans les années 1970 à leur importation en Europe et à l’émergence de la nouvelle géographie. Accueilli avec scepticisme par les tenants de la géographie classique comme par les courants marxistes qui dominaient alors la géographie française, il s’installe à Genève où il fera l’essentiel de sa carrière. Orientant, par la suite, sa recherche sur la question du bien-être et développant une approche attentive aux représentations des populations, il contribua à un profond renouvellement de la géographie humaine. Ses travaux plus récents sur la médicométrie marquent également une avancée de la géographie dans le domaine des politiques territoriales de service public. Il est l’auteur de nombreux manuels et ouvrages de géographie, dont La géographie du bien-être, paru en 1981 (Presses universitaires de France).
Acteur du renouvellement de sa discipline, Antoine Bailly est aussi un géographe soucieux du rôle social et politique de la science. Il défend une science ancrée dans le monde social, une science appliquée qui soit directement utile à l’aménagement du territoire et aux politiques régionales. Il est également le fervent promoteur d’une géographie par le bas, qui prenne en compte les aspirations des populations locales dans les choix politiques d’aménagement. Il a enfin participé à la fondation des cafés géographiques et du Festival international de géographie de Saint-Dié-des-Vosges, vecteurs de diffusion et d’animation de la discipline.
Dans cet entretien, Antoine Bailly revient sur les principes qui ont fondé ses recherches et sur les implications politiques de son approche. Il aborde également les questions de la participation des populations, des politiques territoriales de santé et de la construction du Grand Paris.
Question 1
Pouvez-vous revenir sur la naissance de la nouvelle géographie, à laquelle vous avez contribué ?
Question 2
Quelles leçons les sciences régionales permettent-elles de tirer en termes de politiques territoriales des services publics, et en particulier des services de santé ?
Question 3
Vous défendez une géographie appliquée et participative : en quoi consiste cette géographie par le bas ?
Question 4
Comment votre approche pourrait-elle guider la construction du Grand Paris ?