Depuis le 22 février, l’Algérie vit au rythme de mobilisations inédites. Des millions d’Algériens ont investi les rues du pays, pour s’opposer au cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika, avant de revendiquer un changement radical de régime. Il en a résulté une inflation d’analyses visant autant à définir le phénomène – insurrection, crise, révolte, Hirak [1], révolution – (Hammouche 2019 ; Ferhani 2019) qu’à réfléchir à ses conditions d’émergence (Aziri 2019 ; Mohamed Aziz 2019). Certaines lectures expliquent ainsi le timing des mobilisations par l’opportunité politique qu’offrirait le moment électoral en contexte autoritaire ; d’autres soulignent le rôle des nouvelles technologies dans la structuration des réseaux qui articulent le mouvement ; d’autres encore expliquent les mobilisations par la dégradation des finances publiques et la corruption qui alimenteraient les griefs populaires ; certaines insistent enfin sur la contribution des jeunes et s’attachent à décrire l’avènement d’une génération politique débarrassée des traumatismes du passé et porteuse de renouveau démocratique.
Nous souhaitons compléter ces analyses en posant la question des expériences citoyennes que les mobilisations rendent possibles. L’objectif est moins de faire l’inventaire des conditions nécessaires à l’émergence du mouvement que de comprendre comment des figures citoyennes se forment et se révèlent, à mesure qu’elles fabriquent l’espace public qui les constitue. La citoyenneté est alors saisie par les pratiques sémiotiques des acteurs : la manière dont ils façonnent les catégories de leurs engagements publics, tracent les contours de leurs communautés et définissent le sens du bien commun.
Nous montrons plus spécifiquement que les mobilisations procèdent d’un souci de soi (Foucault 1984) qui se manifeste dans le déploiement d’une civilité urbaine. Les performances publiques des citoyens algériens contribuent, par l’autocontrôle et la maîtrise de soi, à démentir un discours officiel qui condamnait les manifestations au « chaos syrien ». Les citoyens puisent en outre dans un fonds commun de luttes pour la dignité, afin de rompre avec des figures de corruption que le régime avait fini par incarner (Hachemaoui 2011). Le roman national devient alors le support d’un processus de subjectivation politique qui accompagne la publicisation de l’espace public (Terzi et Tonnelat 2016).
Cette réflexion prend appui sur un matériau collecté en ligne : slogans et pancartes, vidéos des agoras citoyennes, entretiens accordés par les manifestants à des journalistes. Nous mobilisons également des données recueillies lors d’enquêtes de terrain réalisées entre 2012 et 2016, dans le cadre d’une recherche sur les émeutes en Algérie.
Une histoire de luttes qui informe le présent
Les mobilisations des derniers mois s’inscrivent dans une longue histoire algérienne de lutte pour la dignité. Entamée après la Seconde Guerre mondiale avec le mouvement de libération nationale, qui devait mettre un terme au joug colonial français et constituer les Algériens en sujets politiques de plein droit, cette lutte se poursuit dès l’indépendance avec l’entrée en clandestinité de militants de gauche ou d’extrême gauche opposés au régime de parti unique (Metref 2017 ; Redjala 1988).
Dans les années 1970, Alger devient le lieu d’exil privilégié des révolutionnaires. L’ANC de Nelson Mandela, l’OLP de Yasser Arafat et les Black Panthers d’Eldridge Cleaver y trouvent refuge et assistance. L’Algérie soutient alors le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et interpelle les pays du Sud sur la nécessité de prendre leur destin en main (Deffarge et Troeller 1972).
Les années 1980 voient l’émergence d’un mouvement culturel berbère (MCB) revendiquant la reconnaissance officielle d’une identité amazighe, dépréciée par les tenants du nationalisme arabe (Temlali 2016). Les mouvements féministes s’amplifient également, portés par une opposition au nouveau code de la famille, accusé de confiner la femme algérienne au statut de mineur à vie (Belhouari-Musette 2006).
En dépit de la guerre civile des années 1990, les luttes n’ont jamais cessé, si bien que le premier mandat du président Bouteflika est marqué par d’importantes mobilisations en Kabylie, au printemps 2001, après la mort d’un jeune homme dans les locaux de la gendarmerie nationale. Ces mobilisations débouchent sur une plateforme de revendications exigeant alors le respect des libertés individuelles et l’approfondissement de la démocratie (Temlali 2003).
Qu’il s’agisse du cadrage des revendications ou des répertoires d’action, les marcheurs des dernières semaines ont largement puisé dans ce fonds commun de luttes, tantôt pour s’en faire l’écho, tantôt pour en tirer des leçons. C’est particulièrement évident dans la manière dont les symboles du roman national sont réinvestis : chants patriotiques, figures héroïques de l’indépendance, drapeau national comme signifiant d’un attachement indéfectible à la patrie.
« Un seul héros, le peuple », slogan fort du mouvement de libération national, se retrouve à nouveau écrit sur les pancartes. Les portraits de Larbi Ben’Mhidi ou d’Ali la Pointe, révolutionnaires mythiques, sont brandis en signe de gloire retrouvée (figure 1). Leurs photos contrastent ainsi avec un portrait présidentiel devenu synonyme de culte de la personnalité.
© Djamila Ould Khettab, Alger, mars 2019. Les auteurs et le comité de rédaction ont fait le choix de flouter les visages, afin de ne pas exposer les manifestant·e·s.
Si les marcheurs s’inscrivent dans la filiation du mouvement de libération nationale, invitant ainsi à reprendre le chemin d’une lutte pour la dignité, d’autres épisodes conflictuels passés orientent les choix stratégiques et les modes d’action.
Les appels au calme, à la retenue, au sens des responsabilités, sont ainsi marqués par l’expérience des émeutes d’octobre 1988 (Aït-Aoudia 2015). Les citoyens les justifient aussi bien par la nécessité de se prémunir contre la répression que par la volonté d’éviter d’offrir au régime la possibilité de bénéficier, comme il a pu le faire par le passé, d’un pourrissement de la situation. Missibssa, un jeune étudiant en finance de 20 ans, explique à France Inter que « toute la population algérienne est catégorique sur ce point : elle veut que ces manifestations restent pacifiques […]. Nous ne voulons pas que ces manifestations soient reprises par quiconque pourrait utiliser la haine et la casse » (Cavaillès 2019).
Les Brassards verts d’Alger et les Gilets oranges se constituent, à la suite d’appels lancés sur les réseaux sociaux, pour aider à encadrer les marches, alerter sur les risques de bousculades et apporter, en cas de besoin, des soins aux marcheurs. Toufik Amrane, journaliste et reporter d’images, a lancé l’initiative des Gilets oranges après que des accrochages ont éclaté le 12 avril entre manifestants et forces de l’ordre, près du tunnel des facultés, à Alger. Il explique avoir contacté des amis journalistes avant d’être rejoint par des bénévoles, dont plusieurs étudiant·e·s ou médecins (Nadir 2019). L’objectif est alors de maintenir le caractère pacifique des marches, en constituant « des rangées, une sorte de cordon entre les policiers et les manifestants, pour créer une distance entre les deux parties » (Alioui 2019).
En tirant ainsi les « leçons » de l’histoire, les marcheurs réinterprètent l’espace des possibles. Ils s’efforcent d’éviter les erreurs du passé et puisent dans le roman national les référents nécessaires à la fabrique d’une identité porteuse de dignité et de civilité.
© Jidal, Alger, mars 2019.
Le souci de soi et le rapport au monde
Si la maîtrise de soi et la retenue des passions sont, comme l’évoquait Norbert Elias, corrélatives du « processus de civilisation » (Elias 1991), il s’ensuit que le caractère pacifiste des mobilisations et l’encadrement strict des marches permet d’envoyer le message sans équivoque au monde que « nous sommes nous aussi des gens civilisés » (figure 3).
© Dilem, Liberté, 18 mars 2019.
La civilité se manifeste également par des actes destinés à assurer la propreté de l’espace urbain ou à en embellir le mobilier. Brassards verts et Gilets oranges organisent le nettoyage des rues, s’affairent au ramassage des déchets après les marches ou repeignent les murs des villes (figure 4 ; Ghellab 2019 ; Saadoun, 2019).
© Jidal, Alger, mars 2019 et © Toufik Amrane, mars 2019.
On peut lire sur la photographie de droite : « pacifique, pacifique, marche civilisée ».
À rebours d’un discours officiel qui agite le spectre du chaos syrien ou renvoie de la jeunesse l’image d’une horde qui menacerait l’ordre public (Belghiche 2019), les marcheurs répondent par un humour caustique, tentent de fraterniser avec les policiers [2], pour s’en faire des alliés, et montrent à chacune de leurs sorties que la citoyenneté peut être une fête.
L’entrée dans l’espace urbain est alors l’occasion de forger une image positive et valorisante de « soi », qui rejette l’assignation à des catégories dépréciatives et rompt avec les images de barbarie terroriste que l’actualité régionale et internationale la plus tragique a contribué à diffuser. Moncef, jeune citoyen algérien interviewé par le site TSA, déclare ainsi : « Le gouvernement essaie de faire croire que nous sommes des sauvages, que nous ne savons pas nous exprimer, ni manifester de façon pacifique et organisée. Nous sommes en train de prouver le contraire. » Son amie Abir ajoute : « Nous voulons donner l’image d’un peuple civilisé, qui sait ce qui est bénéfique pour son pays » (Saadoun 2019).
La manière dont certains slogans reprennent les signes et symboles des produits mondialisés de consommation témoigne tout à la fois des armes de résistance qu’offre l’humour et de la volonté d’investir une culture partagée qui, par-delà l’Algérie, permet d’instituer un monde sémiotique commun. Les paquets de Marlboro deviennent ainsi « mal barrés, votre système nuit gravement à notre système de santé » (figure 5) ; on rappelle que « seul Chanel peut faire le numéro 5 » ; la formule de Yoda dans Star Wars est détournée au bénéfice du peuple (figure 5) et le docteur Emmett Brown de Retour vers le futur interpelle Marty McFly sur les risques de déchirures de l’espace-temps associés au prolongement du quatrième mandat du président Bouteflika (figure 6)…
© Ziri Gunfood Oulmane, Alger, mars 2019.
© Ziri Gunfood Oulmane, Alger, mars 2019.
Si les performances publiques offrent l’occasion d’une présentation et d’une représentation valorisante de soi, c’est aussi qu’elles permettent la mise à distance de parangons de servilité que le régime a fini par banaliser, comme la figure bien connue du chiyatt – le « brosseur » –, celui qui flatte le puissant dans le sens du poil ou en chante les louanges, pour mieux s’attribuer ses faveurs – ou la figure, plus récente, du mangeur de cachir. Le cachir est un pâté (bologne) offert en sandwich au public venu assister au meeting de campagne d’Abdelaziz Bouteflika. Le mangeur de cachir est alors décrié comme celui qui s’inscrit dans un rapport clientéliste avec le régime et accepte une posture de vassalité (figure 7). Cette posture est d’autant plus indigne que les meetings de campagne sont marqués par des rituels révérenciels impliquant le portrait officiel du président, à défaut de sa présence physique.
Dans ces conditions, la candidature d’Abdelaziz Bouteflika est vécue comme une humiliation. Les images du meeting, diffusées à la télévision nationale, se traduisent par un choc moral, une réaction viscérale d’indignation et de colère face à une situation jugée moralement insoutenable (Jasper 1998). Des portraits officiels du président sont alors arrachés des façades des Assemblées populaires communales [3] de Khenchela ou d’Annaba [4].
© Hicheme le Hic, El Watan, 23 février 2019.
L’investissement collectif de l’espace urbain témoigne alors d’un souci de soi qui « place la question de la vérité – de la vérité de ce que l’on est et de ce qu’on est capable de faire – au cœur de la constitution du sujet moral » (Foucault 1984, p. 94). Elle s’accompagne d’un processus de subjectivation par lequel les marcheurs se donnent à voir tels qu’ils souhaitent être vus, rejettent l’assignation aux catégories d’incivilité, de chaos ou de barbarie et investissent les référents valorisants de l’identité collective (lutte du mouvement de libération nationale), pour rompre avec des figures de vassalité (culte du portrait présidentiel, figure du mangeur de cachir). Ils se définissent ainsi en sujets éthiques et politiques aptes à reprendre en main leur destin collectif.
Cette entreprise de redéfinition ouvre l’espace des possibles, dès lors qu’elle permet de réévaluer la capacité d’action des personnes mobilisées sur leur monde. S’inscrire dans la filiation des glorieuses figures de la guerre de libération nationale, c’est s’intimer le devoir d’agir et se sentir le pouvoir de le faire. C’est enfin raviver l’espoir en la possibilité de redresser les rapports entre État et société, dont la détérioration s’était jusqu’à maintenant traduite par un accroissement du nombre d’émeutes ou de candidatures à l’immigration irrégulière.
« Je ne veux plus te quitter, mon Algérie »
Dans un texte désormais classique, Albert Hirschman (1970) soutient que les individus peuvent répondre de deux manières à une relation qui se détériore : en sortir (exit) ou faire entendre leurs griefs (voice). L’option choisie dépend du coût d’opportunité de chacune, de l’attachement à l’organisation (loyalty) et de l’espoir en la possibilité effective de redresser la situation [5].
Dans le cadre de recherches menées sur les émeutes urbaines en Algérie (Derradji, à paraître), nous avons montré que les individus qui s’y engageaient faisaient l’expérience d’une dévalorisation statutaire. En dépit des motifs variés par lesquels ils justifiaient leurs actions – absence de logement, chômage, abus de pouvoir, corruption d’agents de l’État, difficulté d’accès aux services publics – ils exprimaient le sentiment unanime d’un déni de leur citoyenneté. Le concept de hogra était particulièrement mobilisé par les « émeutiers » pour rendre compte des rapports à l’autorité publique. Dans le langage populaire algérien, ce terme désigne à la fois un abus de pouvoir et le mépris dont peuvent faire preuve des individus qui occupent des positions dominantes.
Pour Adel, jeune « émeutier » de 28 ans, l’émeute est un voice. C’est le moyen de « transmettre un message et dire aux autorités qu’on existe ». Or si on lutte pour exister, c’est bien que la reconnaissance fonde l’égalité en dignité, laquelle permet un accès équitable aux ressources matérielles et symboliques de l’État. Si cette égalité ne semble pas garantie ; si les normes et obligations qui encadrent le rapport du citoyen à l’autorité publique sont enfreintes ou soumises au pouvoir discrétionnaire d’agents de l’État ; si des catégories d’individus jouissent d’un accès privilégié aux ressources matérielles ou symboliques de l’État, alors que d’autres s’en trouvent exclus, l’autorité publique finit par construire, dans le quotidien de ses interactions avec les individus, des catégories duales de citoyenneté.
Ainsi relégué aux « lisières de la citoyenneté » (Jenson 2007, p. 24), Abdou, jeune « émeutier », finit par nous rappeler l’évidence en guise de justification de sa colère : « J’ai une carte d’identité nationale comme tout le monde. »
Dans ses travaux sur les harragas algériens, candidats à l’immigration irrégulière, Farida Souiah (2012), montre comment ces derniers sont souvent évoqués comme « preuve ultime des dysfonctionnements qui touchent le pays » (p. 105). Elle souligne en outre qu’el harga est une sortie (exit) au sens d’Hirschman, « une stratégie active destinée à faire face à une situation difficile dans laquelle misère et hogra les empêchent d’envisager un avenir » (p. 119). Cette option finit, en outre, par supplanter le recours à la protestation (voice), car celles et ceux qui la choisissent ne croient plus en la possibilité d’améliorer leur situation en Algérie.
Les mobilisations des derniers mois se sont accompagnées de slogans tels : « pour la première fois, je ne veux pas te quitter mon Algérie » ou encore « rana hna ! » (on est là !) (figure 8). Les performances publiques des citoyens algériens, en introduisant de nouvelles façons de manifester et de se manifester (voice) et en réitérant l’attachement à la communauté politique, permettent la fabrique d’un sujet politique capable d’agir sur son monde et contribuent à renouveler la croyance en la possibilité d’un avenir meilleur, porteur d’opportunités sociales et de dignité politique. Le présent embrasse ainsi dans une même vision une gloire passée retrouvée et des attentes futures réactualisées.
© Algérie Debout, 2019 et © Collectif Rana hna, 2019.
Le sentiment d’une reprise en main du destin collectif finit par libérer les énergies. Les initiatives citoyennes se multiplient à travers le territoire national algérien et racontent le besoin collectif d’entreprendre. Des débats et des assemblées citoyennes sont ainsi organisés par différents collectifs pour discuter de l’Algérie de demain (figures 9 et 10).
© Jidal, mars 2019.
© NABNI, mars 2019.
Si les slogans à travers lesquels s’expriment les manifestants véhiculent des discours qui s’inscrivent dans le registre du lien social qui unit – sinon uniformise – et qui pacifie – sinon invisibilise les divergences –, les interactions citoyennes au sein des forums publics qui se constituent (physiques comme médiatiques) offrent autrement la possibilité de se manifester (voice). À cet égard, en publicisant des situations problématiques vécues individuellement ou localement, ces modalités d’interaction expérimentales laissent transparaître les clivages et les inégalités qui traversent le monde social (Terzi et Tonnelat 2016 ; Dewey 2010 ; Mead 2006). La préservation de l’espace public est alors tributaire de la manière dont ces rapports sont négociés, pour permettre l’expression du dissensus, sans compromettre la participation à la communauté politique.
Mérites et limites d’une expérience citoyenne transformatrice
Les mobilisations des derniers mois ont fait bien plus que briser le mur de la peur, comme aiment à le souligner certains analystes de la scène politique algérienne (Lepage 2019). Elles ont conduit à un véritable réenchantement du politique.
D’abord, parce qu’elles procèdent d’un salutaire souci de soi (Foucault 1984), les performances publiques des citoyens algériens participent, par l’autocontrôle et la maîtrise de soi, à déconstruire un discours officiel qui condamnait les manifestations au « chaos syrien ». Ils puisent en outre dans un fonds commun de luttes pour la dignité, afin de rompre avec des figures avilissantes de vassalité et façonner des représentations valorisantes de soi qui participent de la formation du sujet politique.
Ensuite, parce qu’elles permettent, comme l’évoquait déjà Hannah Arendt, le passage d’une existence privée, tout entière affairée aux activités vitales de production et de reproduction, à une existence publique soucieuse de discuter et de construire un monde commun. Le sentiment de fierté retrouvée dont témoignent les citoyens algériens, de même que le bonheur d’être ensemble qu’ils expriment, rappellent le caractère émancipateur de l’action politique (Arendt 1995).
La préservation de cet acquis demeure toutefois un enjeu perpétuel. Alors que l’appropriation des espaces publics offre des ressorts à la « motilité » (Djelloul et Mezoued 2019 ; Kaufmann et Jemelin 2004), sinon des « prises » (Joseph 1997) génératrices d’une confiance dans la capacité de se redéfinir et d’agir collectivement, la (dé)libération des voix (au sein de dispositifs publics de prise de parole) met en évidence l’épreuve d’articuler le pluralisme d’une société qui (ré)apprend tout juste à se (re)connaître. Autrement dit, à travers les différentes modalités d’expression, survient une prise de conscience de la composition du public et de ses qualités sociologiques diverses. Se profilent alors des revendications identitaires plurielles, qui laissent largement indéterminées les modalités de la coexistence au sein d’un espace politique commun revitalisé.
Bibliographie
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