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Les territoires du vote

Comment se construisent les préférences électorales ? En associant l’analyse des dynamiques sociales à celle des contextes locaux pour comprendre les processus électoraux, notre dossier invite à replacer l’isoloir dans les territoires.


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Des bastions communistes de la banlieue rouge aux beaux quartiers ancrés à droite, les exemples de territoires associés à des groupes sociaux porteurs d’orientations politiques ou partisanes ne manquent pas. Les élections présidentielles de 2012, suscitant une intense mobilisation médiatique, sont l’occasion de revenir sur la question des ancrages territoriaux du vote. La presse, à grands renforts de cartes et de reportages sur le terrain, tente ainsi de dresser les portraits politiques de villes, de quartiers populaires ou encore d’espaces périurbains ou ruraux jugés idéal-typiques [1]. Dans la lignée des travaux pionniers d’André Siegfried, qui montrait il y a un siècle que l’opposition des orientations électorales entre territoires calcaires et granitiques de la France de l’Ouest tenait à des configurations sociales spécifiques, les sciences sociales connaissent depuis quelques années un renouveau des approches localisées. En mobilisant des recherches récentes qui inscrivent les processus électoraux dans leurs contextes locaux, ce dossier vise à apporter une contribution à la compréhension des liens entre vote et territoires.

En effet, les discours sur les relations entre contextes locaux et orientations électorales n’échappent pas toujours à certains écueils. Le dossier revient tout d’abord de manière critique sur les deux principaux outils utilisés pour appréhender les déterminants du vote : les sondages et la cartographie. Jean Rivière et Joël Gombin mettent ainsi en garde contre les impasses d’une approche désincarnée des électeurs dont sont porteurs les sondages, mais également d’une approche qui donnerait le primat à la localisation résidentielle comme unique facteur explicatif des orientations électorales. À partir d’un travail d’analyse statistique fine, mené à l’échelle des bureaux de vote et croisant données électorales et données sociologiques, Jean Rivière souligne plutôt le rôle des inégalités socio-spatiales en matière de résultats électoraux.

L’attention portée aux contextes socio-spatiaux amène ainsi à complexifier le regard porté sur les configurations électorales locales, souvent moins homogènes que ne le donnent à penser les représentations du sens commun. Ainsi, l’enquête de Jessica Sainty dans une municipalité communiste de la banlieue de Grenoble permet de souligner la diversité des logiques du vote en faveur du PCF, expliquant le paradoxe du maintien de l’ancrage local en dépit d’un déclin national durable. Dans une commune rurale de la Somme, l’étude de Sébastien Vignon permet, quant à elle, de souligner le rôle de l’implantation locale de militants du FN en matière de mobilisation électorale de certaines catégories sociales.

L’intérêt des approches localisées du vote apparaît particulièrement dans le cas des espaces périurbains, souvent présentés comme des territoires homogènes peuplés de ménages modestes acquis à la droite en raison de multiples « frustrations sociales ». À l’inverse de cette représentation, trois articles consacrés à des contextes périurbains contrastés permettent de souligner la diversité sociale des classes populaires de ces territoires : « petits-moyens » dont l’entrée en pavillon de banlieue marque une fragile ascension sociale (Cartier et al.), familles issues de l’immigration devant faire face aux difficultés économiques de l’accession à la propriété (Lambert), fractions stables des classes populaires d’un bassin industriel dynamique (Girard)... Autant que les contextes locaux, les attitudes politiques et les comportements électoraux des périurbains sont ainsi marqués par une grande diversité.

Enfin, ce dossier apporte un éclairage sur les mobilisations partisanes en période de campagne électorale, en retournant la question classique des travaux de Paul Lazarsfeld : « que fait la campagne aux électeurs ? » pour examiner ce que la campagne fait à ceux qui la font. À partir de l’ouvrage collectif sur les élections municipales à Paris, Lucie Bargel souligne, là encore, la diversité des façons de faire campagne, en montrant les variations des attributs sociaux dont les candidats souhaitent ou peuvent se prévaloir en fonction des configurations localisées dans lesquelles s’inscrit leur campagne. Est également soulevée la question des engagements militants ainsi que des rétributions, locales ou nationales, des adhérents engagés dans ce travail de mobilisation (Anne-Sophie Petitfils).

Au sommaire de ce dossier :

Cartographie et approche contextuelle : un renouveau de l’analyse du vote

Dynamiques du vote et ancrage local

Pavillonnaires et périurbains : diversités sociales, territoriales et électorales

Faire campagne : militants et candidats dans les contextes locaux

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Pour citer cet article :

Anaïs Collet & Pierre Gilbert & Violaine Girard, « Les territoires du vote », Métropolitiques, 11 avril 2012. URL : https://metropolitiques.eu/Les-territoires-du-vote.html

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Revue soutenue par l’Institut des Sciences Humaines et Sociales du CNRS

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